Les ghettos, les « enfants-ghetto » et les « parents-ghetto »
Un quartier est un “ghetto” s’il satisfait deux de ces trois critères, selon NPR:
- La moitié des résidents sont des immigrants de pays non occidentaux,
- Au moins 40 % des résidents sont au chômage,
- Au moins 2,7 % ont écopé de condamnations pénales.
25 quartiers ont donc été identifiés comme étant des “ghettos” au regard de ces critères. Cela concerne une population de 60.000 personnes, dont les deux tiers sont des immigrés originaires de Turquie, de Syrie, d’Irak, du Liban, du Pakistan ou de Somalie, c’est-à-dire de pays à majorité musulmane.
Si ces lois sont validées en septembre, les enfants âgés de plus d’un an qui vivent dans ces quartiers devront fréquenter des crèches pendant au moins 25 heures par semaine, où ils apprendront la culture et la langue danoise, y compris les fêtes chrétiennes, comme Noël et Pâques. On parle d’ailleurs “d’enfants-ghetto” et de “parent-ghetto”. Si les parents refusent d’envoyer leurs enfants, ils risquent de perdre leurs prestations sociales. De même, les parents n’auront plus le droit d’envoyer leurs enfants dans leur pays d’origine en séjour prolongé, où ils pourraient apprendre des valeurs contraires aux valeurs danoises. Ils risqueraient 4 ans de prison en cas d’infraction.
D’autres propositions
Une autre proposition de loi envisage d’appliquer des peines doubles pour les personnes ressortissantes de ces ghettos en cas de condamnation se rapportant à des délits de vandalisme ou de vol. Enfin, une proposition évoque même la possibilité de donner aux autorités locales le pouvoir d’augmenter le dispositif de surveillance à l’égard de ces “ghettos”.
Le parti d’extrême droite “Parti du Peuple danois” (Dansk Folkeparti) avait aussi proposé d’instituer un couvre-feu pour obliger les jeunes de ces quartiers à rentrer chez eux après 20 heures. Lorsqu’on lui avait demandé comment une telle mesure pourrait être mise en oeuvre, un politicien avait même proposé de les équiper d’un bracelet électronique, une idée qui a été rejetée.
Le plan gouvernemental prévoit également la rénovation de certains quartiers et des aides à la recherche d’emploi.
Près de 87 % des 5,7 millions de Danois sont d’origine danoise, les immigrés et leurs descendants représentant le reste de la population. Les deux tiers des immigrés viennent de pays non occidentaux, une partie étant des Afghans, Irakiens et Syriens arrivés pendant la grande vague de migration des années 2015 et 2016.
Ces initiatives pour éradiquer les “ghettos” sont perçues comme ciblant plus spécifiquement les musulmans. Mais le gouvernement balaie ces critiques et explique qu’il veut seulement rendre le pays plus sûr.
Des réminiscences de l’ère nazie… auxquelles les Danois sont devenus totalement insensibles
L’opposition de gauche soutient une partie de ces mesures, estimant qu’elles sont nécessaires pour défendre le système social danois. Birgitte Arent Eiriksson, avocate senior du think tank danois Justitia, explique que de plus en plus de politiciens danois “pensent que ce sont les musulmans qui sont à l’origine des problèmes dans ce pays, et que si on parvient à les contrôler et à empêcher les arrivées d’autres musulmans, certains de ces problèmes disparaîtront”.
L’assimilation forcée et la discrimination, pas plus que la terminologie de “ghetto”, ne semblent gêner quiconque. Selon Yildiz Akdogan, une députée sociale-démocrate élue d’une région qui comprend le quartier de Tingbjerg, classé comme ghetto, les Danois sont devenus si insensibles à la rhétorique des immigrés qu’ils ne saisissent plus la connotation négative du mot « ghetto », son lien avec l’ère nazie et avec la ségrégation des juifs.
En mai, la ministre danoise de l’Immigration, Inger Støjberg, avait déclaré qu’il était “dangereux” que les musulmans travaillent lorsqu’ils se soumettent au jeûne sacré du ramadan. Selon elle, il vaut mieux qu’ils restent chez eux “pour éviter des conséquences négatives pour le reste de la société danoise”.
Plus tard ce mois-là, le Danemark a adopté un projet de loi interdisant aux personnes de porter le voile intégral dans les espaces publics.