Encore une information que la presse occidentale a décidé de ne pas traiter. En effet, elle est délicate. Et il ne faut pas porter atteinte à l’image de la liberté artistique, de la liberté d’expression. Eléments sacralisés dans le discours contemporain.
La FIFA a interdit la chanteuse de rock russe Julia Chicherina de chanter devant les fans à Rostov-sur-le-Don, elle pourrait porter atteinte à l’image de la FIFA (sic). Nous vivons dans un monde merveilleux, l’essentiel est de ne pas l’oublier.
La chanteuse de rock russe Julia Chicherina vient de recevoir une lettre de la FIFA, en anglais, qui ne lui est pas nommément adressée, mais qui la concerne et qu’elle a publié sur sa page Facebook:
L’on apprend ainsi que la FIFA a discuté du cas de Chicherina, c’est en tout cas ce qu’affirme Ekaterina Savchenko, et qu’il est impossible que la chanteuse ne se produise devant les fans à Rostov sur le Don, puisque la FIFA exclue toute chanson politique, religieuse ou militaire. Or, même si Chicherina ne chante pas une chanson militaire, son répertoire et sa réputation pourraient porter atteinte à l’image de la FIFA et provoquer une attention négative des médias, puisqu’elle est déjà associée à la thématique militaire.
Où est l’objet du délit? Julia Chicherina s’est produite dans le Donbass, a des chansons qui condamnent la guerre menée par l’Ukraine contre les civils. C’est effectivement inacceptable. Enfin, d’en parler. Cela pourrait porter atteinte à l’image de la FIFA. Puisque cela va à l’encontre du mantra de la responsabilité de la Russie, de l’Ukraine-victime. Or, les mantras se répètent, ils ne se discutent pas.
La chanteuse a commenté cette lettre:
« Mon Dieu! Les supporteurs bandéristes m’ont interdit de me produire à Rostov, à une centaine de kilomètres de la ville martyre de Gorlovka, où les enfants dorment dans les baignoires pour ne pas être blessés par les éclats de missiles la nuit.
Beaucoup dans le Donbass estiment que les Russes ne viennent pas à leur secours en raison de ces grandes bacchanales du football. Il est bien connu que le rock est la musique de la contestation et l’on m’a officiellement interdite. J’ai reçu une lettre – en anglais – d’une gentille femme avec un nom ukrainien et l’on m’a demandé de ne rien dire. »
Donc la FIFA peut interdire en Russie une chanteuse russe de se produire pour ne pas déplaire à la communauté internationale qui ne veut pas savoir que des civils sont victimes de l’armée ukrainienne dans le Donbass? Même si elle n’en parle pas. Simplement en raison de ce qu’elle est? Est-ce possible? Est-ce acceptable? Du compromis à la compromission, le glissement peut être rapide.
Où sont toutes ces organisations, tous ces activistes qui se prononçaient pour la défense des Pussy Riot qui profanaient une Eglise? Pour la défense de Pavlensky lorsqu’il brûlait la porte du FSB? Ils se taisent? Il est vrai qu’ils en ont l’habitude. L’indignation est sélective. Quand Pavlensky est incarcéré en France pour avoir renouvelé sa performance, on découvre que ce n’est plus de l’art.
L’art est donc géographique. Il est en fait ce que l’Occident décide qu’il peut être. Il peut être les Pussy Riot, il ne peut être Chicherina.
Nous vivons dans un monde merveilleux!
PS: Deux chansons traduites en français:
PS: Deux chansons traduites en français: