La réaction des médias occidentaux à un reportage impartial sur les cerveaux de l’explosion des gazoducs a montré que la guerre moderne est menée par tous les moyens. Ryma Rouibi, enseignante-chercheuse à l’ENSJSI, à Alger, partage à L’Afrique en marche ses réflexions sur la stratégie à adopter pour ne pas devenir une victime de fake news.
Le journaliste indépendant américain lauréat du prix Pulitzer Seymour Hersh a publié une enquête accusant le Président Biden d’avoir ordonné le sabotage des gazoducs Nord Stream, qui relient la Russie à l’UE via la mer Baltique. Curieusement, alors que le rapport de Hersh a provoqué une onde de choc dans le monde entier, les gouvernements et les médias de masse occidentaux ont choisi de l’ignorer.
Pis encore, le New York Times a fait paraître une contre-enquête maladroite et manifestement sans arguments consistants. Cette publication n’a finalement servi qu’à attirer encore plus l’attention sur la culpabilité des États-Unis dans l’explosion des gazoducs.
« Actuellement, la désinformation, les fake news et les pratiques journalistiques, qui accompagnent et assurent leur diffusion, sont devenues une arme de guerre redoutable, intégrant complètement le système de tous les autres arsenaux militaires et économiques dans ce que les spécialistes appellent aujourd’hui les guerres hybrides », affirme à Radio Sputnik Afrique Ryma Rouibi, enseignante-chercheuse à l’École nationale supérieure de journalisme et des sciences de l’information (ENSJSI), à Alger. Selon elle, « le but étant de servir les intérêts et la politique étrangère de pays, les États-Unis et leurs alliés de l’Otan dans le cas d’espèce, qui concerne le sabotage des gazoducs Nord Stream ».
« La désinformation et la manipulation, aussi bien de l’opinion publique que des dirigeants politiques, n’ont pas commencé avec le lancement de l’opération militaire spéciale russe en Ukraine », estime Mme Rouibi, rappelant qu’ »en 1990 déjà, l’Irak a été l’objet d’une des plus célèbres campagnes de désinformation et de manipulation de l’histoire ». Selon la chercheuse algérienne, « la mobilisation de la communauté internationale par la suite pour appliquer les résolutions de l’Onu contre l’Irak n’a été que plus facile ». Et d’ajouter qu’ »en 2003, nous avons vu comment les États-Unis ont envahi l’Irak à partir d’une fake news ‘officielle’, celle des armes de destruction massive ».
Ce « que subit la Russie aujourd’hui en termes de désinformation relève des mêmes principes et stratégies, mais avec plus de moyens technologiques, notamment Internet et les réseaux sociaux », souligne-t-elle.
Pour combattre la désinformation et les fake news, « il faut au préalable avoir conscience qu’une campagne de désinformation est en cours », préconise Ryma Rouibi, indiquant que « des solutions technologiques existent, permettant d’identifier si une campagne est en cours, son origine, qui tire les ficelles et quels pourraient être ses objectifs ».
Par ailleurs, elle soutient qu’avec le numérique, beaucoup de personnes « ont perdu leurs réflexes humains et sont en permanence confrontées à des expériences pavloviennes, alors que réfléchir, penser, s’interroger, chercher la vérité sont les principales activités humaines. En un mot: le citoyen a besoin de renouer avec ces pratiques qui font de lui un humain et non une machine à produire de l’infox ».