A l’époque du multiculturel et du politiquement correct, il est devenu banal d’entendre affirmer, au nom de la « tolérance », que le christianisme et l’islam, l’un autant que l’autre, vénèrent Jésus!
Qu’il soit appelé Jésus ou Issa ne serait qu’un détail sans conséquence, puisqu’il appartiendrait de droit aux deux religions…
Dans la même perspective, sous l’influence de Massignon et de ses émules, l’appellation de civilisation « abrahamique« , a remplacé ce que précédemment on nommait civilisation judéo-chrétienne! Les journalistes se réfèrent maintenant aux « trois monothéismes« , ce qui permet, au passage, de placer l’islam au même niveau que le judaïsme et le christianisme, laissant croire que la religion de Mahomet (Mohamed) appartient à l’héritage biblique…
Des commentateurs chrétiens n’hésitent pas (par ignorance) à reprendre à leur compte l’expression pourtant spécifiquement islamique de « religions du Livre« , qui désigne juifs et chrétiens considérés avec condescendance par l’ultime « révélation coranique ». Alors qu’en fait ni le judaïsme ni le christianisme ne sont une religion du livre, et que seul l’islam donne littéralement au livre du Coran un statut aussi central et sacralisé. Allah incarné dans un livre qui ignore l’historicité et qui – incréé – serait hors du temps.
Toutes ces expressions malencontreuses reflètent une idéologie qui gagne chaque jour du terrain dans les médias et les mentalités, traduisant surtout l’irruption de l’islam en ce début de troisième millénaire. Actualisation du hadith: « l’islam domine, mais n’est pas dominé…
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Quelle est la logique de ce processus?
L’islam se perçoit comme la religion primordiale. Pour lui, le judaïsme et le christianisme n’en sont que des développements accessoires, et périmés. Les musulmans et eux seuls forment « la meilleure communauté au monde« (3.110)
Car pour le Coran, Abraham (Ibrahim) est le prototype radical du monothéiste, soumis à Allah (3.66), le hânif. Les musulmans et eux seuls sont donc les vrais représentants de cette foi fondamentale d’Abraham dans le monde d’aujourd’hui!
Or la religion de l’Abraham biblique et celle de l’Abraham coranique n’ont pas grand chose de commun. La ressemblance est purement formelle. Si l’Abraham de la Bible est le premier maillon vivant d’une chaîne historique de croyants en la promesse de Dieu, l’Abraham du Coran est un prophète qui proclame une foi intemporelle et abstraite en l’unicité d’Allah. L’Abraham biblique renonce à sacrifier son fils Isaac, (Ismaël, dans le Coran) car le « Dieu des vivants » a en horreur les sacrifices humains.
Mais la relation à Dieu sous forme d’alliance, c’est à direde réciprocitévivante etconfiante, si fondamentale chez les juifs et les chrétiens, est absente dans l’islam. L’Abraham du Coran est le premier « soumis » de toute une série de personnages, Adam, Noé, Jésus, etc. Les prophètes du Premier Testament manquent à l’appel, car le sens du mot « prophète » (nabi en hébreu, rasûl en arabe) n’est pas le même en islam.
Le musulman ISSA (=Jésus?)…
Deux sources décrivent le personnage d’Issa, Jésus musulman : le Coran et les Hadith, les deux ayant autorité et constituant la sunna, la tradition islamique.
Le Coran donne un bref aperçu de sa vie, tandis que les Hadith (collection de dits du prophète Mohamed) précisent son rôle dans la compréhension islamique des temps à venir.
ISSA dans le Coran:
Selon les sourates qui parlent de lui, Issa est un prophète de l’islam parmi d’autres, mais dont l’envergure est particulière. Son message est purement islamique, en relation avec Allah (3.84). Comme tous les prophètes avant lui, et comme Mohamed après lui, Issa n’a pour seul but que de donner la loide l’islam, et de ce fait, ses disciples appelés chrétiens devraient s’en remettre à cette seule loi (3.50; 5.48) car, au départ, ils étaient naturellement soumis à Allah en affirmant: « nous sommes croyants« , en d’autres termes: « nous sommes musulmans » (5.111).
Les Livres
Comme tous les prophètes de l’islam avant lui, Issa a reçu sa révélation de l’islam sous la forme d’un livre (6.90), appelé injil , (déformation de: évangile). La Torah était le livre d’Abraham, (!) et le Zabour (psaumes) était le livre de Daoud (David).
C’est pourquoi les juifs et les chrétiens sont appelés les « gens du livre« . (ahl al kitab) Mais la seule religion révélée dans tous ces livres, c’est l’islam (3.18).
La révélation donnée à Issa confirme les prophètes qui l’ont précédé (3.49, 84; 5.46; 61.6). Mohamed lui-même, « sceau des prophètes« , a authentifié toutes les révélations antérieures, celle d’Issa incluse (4.47). C’est la raison pour laquelle les musulmans doivent croire dans la révélation que Issa a reçue (1.136) tout en sachant que son livre, injil, a été détourné de sa forme originelle par ses adeptes, et que, de nos jours, seul le Coran est le guide sûr pour accéder à l’enseignement d’Issa!
La biographie coranique de Issa
Selon le Coran, Issa était « Messie« . Il était sous l’influence du Saint Esprit (2.87; 5.110). Il est également présenté comme parole d’Allah (4.171).
La mère de Issa, Mariam, était la fille d’Imram (3.34,35) (cf le Amram de l’Exode) et la sœur d’Aaron et de Moïse (19.28). Elle avait été adoptée par Zakariah (père de Jean-Baptiste) (3.36). Toujours vierge, Mariam donna naissance à Issa, seule dans un lieu désert, non pas à Bethlehem de Judée, mais sous le palmier dattier (19.22s) d’une oasis.
Issa se mit à parler, encore bébé, dans son berceau (3.46; 5.110; 19.30). Il réalisa de nombreux prodiges, comme d’insuffler la vie à des oiseaux d’argile, de guérir les aveugles et les lépreux, de relever des morts (3.49; 5.111). Mais surtout, il annonça la venue de Mohamed (61.6).
Issa n’est pas mort sur une croix
Le Coran rectifie les messages qui l’ont précédé, car « les chrétiens et les juifs ont corrompu leurs Ecritures » (3.74-77; 113). Bien que les chrétiens croient que Jésus est mort en croix, il ne fut en réalité ni tué ni crucifié, et ceux qui affirment la crucifixion sont des menteurs (4.157).
Issa n’est jamais mort, mais a connu une ascension auprès d’Allah (4.158). C’est pourquoi, au jour de la résurrection, Issa en personne portera un témoignage d’accusation contre les juifs et les chrétiens qui ont cru à sa mort en croix (4.159).
Les vrais chrétiens devraient accepter l’islam
De la part des chrétiens et des juifs, il est impardonnable d’ignorer le fait que Mohamed a transmis le Coran comme claire évidence de la révélation d’Allah (98.1). Mohamed était même le cadeau d’Allah aux chrétiens, venu corriger leur mauvaise interprétation et leur déviance. Ils devraient donc accepter Mohamed comme messager d’Allah, et le Coran comme la révélation finale! (5.15; 57.28; 4.47).
Les « vrais » chrétiens étant par définition incapables d’aimer les ennemis de Mohamed (58.22), de ce fait, quiconque s’oppose au message de Mohamed ne peut pas être un vrai chrétien.
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Les chrétiens qui refusent ou acceptent l’islam
Quelques juifs et chrétiens sont de vrais croyants, car ils acceptent l’islam, ne parlent ni n’agissent en sa défaveur; mais la plupart, indifférents ou hostiles, sont des transgresseurs (3.109) qui seront châtiés, puisque ceux qui refusent de reconnaître la mission de Mohamed iront en enfer (98.6).
Pour le Coran, il est clair que les musulmans ne devraient « jamais prendre pour amis des juifs ou des chrétiens » (5.51). Ils doivent plutôt les combattre jusqu’à ce qu’ils se soumettent, payent la taxe de dhimmi, et soient humiliés (9.29).
Des centaines de versets coraniques sont de fait consacrés au « jihad dans le sentier d’Allah » (= guerre armée contre les infidèles). On trouve dans ce livre « sacré » plus fréquemment les termes de combattre et de tuer que le mot prier.
Il existe un Livre du Jihad dans toutes les collections de Hadith, ce quiprouve la centralité de ce thème combattant, assimilé à un 6ème pilier de l’islam pour tout un courant historique.
Les croyances des chrétiens
Il est expressément demandé aux chrétiens de ne pas croire que Issa est le Fils de Dieu. La paternité étant perçue sur le plan purement biologique, la transcendante majesté d’Allah est évidemment incompatible avec le fait d’avoir un « fils » (4.172; 25.2).
Issa n’était simplement qu’une créature humaine, et un serviteur d’Allah. (4.172; 3.59).
Le Coran accuse les chrétiens de blasphémer, parce qu’ils croient en une famille de dieux: Dieu le Père, Marie la mère, et Issa le Fils… Pourtant Issa a rejeté cet enseignement (5.116). La doctrine de la trinité est une mécréance, et une destinée douloureuse attend inévitablement ceux qui y adhèrent (5.73) car le blasphème mérite les plus sévères sanctions. Les « associateurs » auront un châtiment particulièrement sévère en raison de cette impiété impardonnable aux yeux de l’islam (shirk).
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Abbé Alain René Arbez, prêtre catholique, commission judéo-catholique de la conférence des évêques suisses et de la fédération suisse des communautés israélites, pour Dreuz.info.