Le commerce maritime représente 80% des échanges commerciaux mondiaux. Il serait dans l’intérêt de la France de se préoccuper d’avantage de cet aspect. Surtout qu’un certain nombre d’éléments ne jouent pas en notre faveur actuellement.
L’actualité est marquée par les annonces de pénuries dans divers secteurs économiques. Si le manque de composants électroniques est le plus médiatisé, d’autres domaines sont aussi touchés. Une des causes a été la désorganisation du commerce mondial. Il convient de rappeler que nos économies sont mondialisées et que les matières premières, comme les productions, viennent souvent d’autres pays, voire d’autres continents. Le discours de la relocalisation et de la souveraineté économique est devenu populaire médiatiquement, mais il n’est pas réaliste. Plutôt que de céder au protectionnisme, la France devrait plutôt essayer de trouver sa place dans le commerce international.
Un commerce maritime dominé par l’Asie
En termes de volume de marchandises en transit, les principaux ports mondiaux sont asiatiques avec une domination chinoise. Selon le World Shipping Council, sur les 10 premiers ports 6 sont en Chine. Singapour, Hong Kong et le port sud-coréen Busan figurent aussi dans les premiers. La côte pacifique américaine s’avère être plus importante que la côte atlantique : les ports californiens de Los Angeles et de Long Beach sont respectivement à la 17ème et 22ème place alors que ceux de New York et de Savannah en Géorgie sont 24ème et 40ème.
Une situation qui s’explique par la montée en puissance des pays asiatiques. En 2020, juste avant la crise Covid, il était prévu que le PIB de l’Asie surpasse celui du reste du monde. Si la pandémie a très certainement affecté ces prévisions, la dynamique est là. Le développement des économies dans cette région fait que 90 % des 2,4 milliards de nouveaux membres de la classe moyenne sont asiatiques.
Une France moins compétitive que ses voisins européens
Du coté des pays européens, seuls 7 ports se trouvent dans le top 50 du classement du World Shipping Council : Rotterdam (10ème), Anvers (14ème), Hambourg (17ème), le Pirée (28ème), Valence (30ème), Algeciras (34ème) et Bremerhaven (36ème).
Aucun port français n’est dans ce classement alors que la France possède la deuxième zone économique exclusive maritime au monde derrière les Etats-Unis. Si l’on examine le fret portuaire des différents pays (calculé en TEU ou Equivalent Vingt Pieds), on constate que la France avec 5 107 857 TEU est à la traîne par rapport à ses voisins. L’Allemagne est à 18 028 702 TEU, les Pays-Bas à 14 522 209 TEU, et la Belgique à 14 066 604 TEU. Le facteur géographique ne suffit pas à expliquer la faiblesse française étant donné que des pays méditerranéens s’en sortent mieux : l’Espagne est à 17 372 500 TEU, l’Italie à 9 800 000 TEU et la Grèce à 5 756 000 TEU.
Des pays économiquement plus faibles que la France se retrouvent devant elle dans le domaine du commerce portuaire.
Plus de décentralisation nécessaire
Les grands ports français sont gérés par l’Etat. Sept d’entre eux sont en métropole : Dunkerque, Le Havre, Rouen, Nantes Saint-Nazaire, La Rochelle, Bordeaux, Marseille. Ils traitent plus de 80 % du trafic maritime de marchandises. De ce fait, l’emprise de l’Etat reste forte sur le commerce maritime français.
Chez certains de nos voisins, la décentralisation prime. Hambourg est géré par le Land éponyme qui est une cité-Etat, créée en 1952 afin d’accorder une autonomie dans la gestion de ce port historiquement majeur. A Rotterdam, les Néerlandais sont allés encore plus loin. Jusqu’en 2004, le port était géré par le département municipal de gestion des affaires portuaires et l’autorité portuaire de la ville. A partir de cette date, son statut se transforme en entreprise publique de droit privé. Ce sont des approches décentralisées, voire des privatisations, qui ont été choisies pour gérer ces ports. Et le fait est qu’ils résistent face au nouveau centre de gravité économique qu’est le Pacifique.
Des atouts pour la France
Il est urgent que la France revoie son organisation portuaire afin d’accroître son attractivité. D’autant plus que le pays a un véritable atout avec la marine nationale considérée comme une « Blue Navy » : une marine capable de se projeter en haute mer. L’Etat devrait plutôt se concentrer sur le régalien et la défense en matière de commerce maritime. La France possède des bases sur les rivages de tous les océans lui offrant une capacité de soutien maritime important. L’Etat français devrait redevenir un gendarme plutôt qu’un gestionnaire.