Alors que Washington et la Turquie se sont entendus sur le dos des Kurdes, une délégation des Forces démocratiques syriennes, coalition arabo-kurde, est à Damas pour entamer des négociations sur l’avenir du nord et de l’est de la Syrie.
En Syrie, les rapports de force sont en constante évolution. Bien qu’à l’origine de la scission de facto d’une large portion du territoire syrien au nord et à l’est du pays, les Forces démocratiques syriennes (FDS) ont accepté le dialogue par le biais de leur bras politique : le Conseil démocratique syrien.
D’après le co-président de ce conseil Riad Darar, une délégation, qui comprend plusieurs responsables politiques et militaires de haut rang, est à Damas ce 27 juillet «à l’invitation du gouvernement». «Nous œuvrons en faveur d’une solution concernant le nord syrien», a-t-il déclaré, cité par l’AFP. Riad Darar a émis l’espoir que les discussions à Damas soient «positives», en insistant sur l’absence de toute «condition préalable aux négociations».
Ce rapprochement pourrait marquer un tournant significatif alors que Damas martèle, depuis le début du conflit en 2011, sa détermination à préserver l’intégrité et la souveraineté du territoire syrien. Fin mai 2018, fort des avancées de l’armée syrienne, Bachar al-Assad avait prévenu qu’il pourrait recourir à la force contre les FDS, afin de reprendre les régions qu’elles contrôlent.
Mais, déjà, sans exclure toutefois la tenue de négociations. «Nous avons d’abord ouvert la voie à des négociations car la majorité des membres [des FDS] sont des Syriens», avait déclaré le dirigeant syrien, conformément à une conception unitaire et non communautariste de son pays. Et Bachar el-Assad d’ajouter : «Si cela ne marche pas, nous allons libérer nos territoires par la force. Nous n’avons pas d’autre solution». Peu après, le Conseil démocratique syrien avait fait savoir qu’il était prêt à engager «des pourparlers sans conditions» avec le gouvernement syrien.
Retournement d’alliance des Kurdes, jusque-là soutenus par Washington ?
Forte du soutien des Occidentaux et des Etats-Unis, la coalition arabo-kurde a instauré une autonomie sur des territoires, au nord et à l’est du fleuve Euphrate. Ces régions, riches en hydrocarbures représentant plus d’un quart de la superficie de la Syrie. Les FDS contrôlent aussi la ville de Raqqa, prise en octobre 2017 aux djihadistes de Daesh.
Pour autant, dans le conflit syrien où nombreux sont les belligérants à s’y être invités, le bras de fer entre la Turquie et les Etats-Unis du début de l’année 2018 a affaibli la position des Forces démocratiques syriennes. Aux dépens des Kurdes, Washington et Ankara se sont entendus en juin dernier pour se partager le contrôle du nord de la Syrie. En juin dernier, l’armée turque a pris le contrôle de la ville de Minbej en juin dernier.
Les Unités de protection du peuple kurde (YPG), jusque-là soutenues par Washington mais qui sont la bête noire du président turc Recep Tayyip Erdogan, avaient dû se retirer de la ville. Trois mois plutôt, en mars, afin de prévenir la formation d’un Kurdistan en Syrie, l’armée turque, conjointement à l’Armée syrienne libre (ASL) pro-turque conquérait l’enclave d’Afrin. Damas avait alors condamné une «occupation turque».
Plus de sept ans après le début de la guerre en Syrie, par pragmatisme face à l’ingérence des Etats-Unis et de la Turquie, Damas comme les combattants kurdes se trouvent ainsi quelque intérêt commun.