Les propositions de loi controversées contre «la manipulation de l’information» en période électorale, ou en tout cas certaines de leurs dispositions, visent-elles RT ? Oui, s’insurgent les députés Nicolas Dupont-Aignan et Eric Coquerel.
Ce 3 juillet à l’Assemblée nationale, les deux propositions de loi (l’une ordinaire et l’autre organique) visant à lutter contre «la manipulation de l’information» en période électorale faisaient l’objet de nouvelles discussions. Et, une fois encore, le nom de RT est rapidement venu aux lèvres des défenseurs comme des contempteurs de ces propositions de loi.
Ainsi, la ministre de la Culture Françoise Nyssen a fait valoir que de nouvelles dispositions contre les fake news étaient nécessaires pour protéger la démocratie française «des tentatives de déstabilisation provenant d’Etats étrangers». Elle a cité l’exemple de l’Ofcom, le CSA britannique, qui est prêt à envisager un retrait de la licence attribuée à RT, en cas d’«utilisation illégale de la force par l’Etat russe».
De quoi en déduire que RT France se trouve dans le viseur du gouvernement, à travers ces propositions de loi ? Des députés de l’opposition en ont en tout cas la conviction. Ils n’approuvent guère cette supposée focalisation du gouvernement et de la majorité sur ce média.
Dupont-Aignan : «Si nos compatriotes vont chercher ailleurs de l’information, c’est peut-être qu’il y a une raison»
«On voit qui est visé, et je ne cherche pas à défendre cette télévision, je crois que c’est RT», a ainsi lancé Nicolas Dupont-Aignan. Or, pour le leader de Debout La France (DLF), le gouvernement serait plus inspiré à œuvrer à une plus grande diversité éditoriale des médias français plutôt qu’à chercher à mettre des bâtons dans les roues d’un média comme RT. «Vous feriez mieux de vous occuper d’ouvrir l’information en France à tous les courants de pensée et de faire respecter d’ailleurs par le CSA l’équité […] qui n’est pas respectée […] même en période électorale, et j’en sais quelque chose, pour faire en sorte qu’il y ait davantage de crédibilité de l’information», a martelé le député de l’Essonne.
Selon lui, si RT France parvient à mobiliser des téléspectateurs et un lectorat, cela s’expliquerait par sa capacité à traiter de sujets délaissés par les médias traditionnels. Prenant l’exemple des violences de Champigny du Nouvel an, «qui ont été cachées par la plupart des télévisions de notre pays» tandis que «les images sont venues» de RT, le souverainiste conclut : «Si nos compatriotes vont chercher ailleurs de l’information, c’est peut-être qu’il y a une raison.»
Coquerel : «C’est un coup de canon cette histoire»
De l’autre côté du spectre politique, le député insoumis Eric Coquerel a lui aussi jugé que le texte destiné à lutter contre les fake news – plus exactement son article 6 – ciblait RT et l’a regretté, pour des motifs différents. «J’ai cru comprendre que c’était Russia Today que vous cibliez», a-t-il déclaré dans l’hémicycle, considérant qu’il s’agissait là de conférer au CSA «une responsabilité quasiment géopolitique». Pour le député, «c’est un coup de canon cette histoire», un coup de canon qui serait tiré selon lui en direction de la Russie.
«Il ne faut pas avoir d’hypocrisie dans cette affaire. Cette affaire, elle éclate depuis qu’il y a des chaînes russes d’information continue. C’est parti des Etats-Unis cette histoire, ça vient maintenant en France et sous couvert en réalité de lutte contre les fake news, il s’agit de possibilités de sanctions géopolitiques», a estimé l’élu de La France insoumise (LFI) de Seine-Saint-Denis, semblant faire référence aux mesures prises aux Etats-Unis contre RT.