Les eurodéputés de la commission des Affaires constitutionnelles (AFCO) ont exprimé le souhait de réformer en profondeur les traités de l’UE dans un rapport approuvé mercredi (25 octobre), une proposition qui supprimerait une série de vetos nationaux et rendrait l’organe exécutif du bloc, la Commission européenne, plus ouvertement politique.
Le rapport de la commission parlementaire, approuvé avec 19 voix pour, six contre et une abstention, constituera la contribution du Parlement à une Convention pour une révision des traités de l’UE.
Certaines des réformes proposées visent à rendre les institutions de l’UE, et en particulier la Commission européenne, plus ouvertement politiques.
L’Exécutif européen
La Commission européenne serait rebaptisée « Exécutif européen » et le président ou la présidente de l’institution serait nommée par le Parlement et approuvée par le Conseil européen, c’est-à-dire les chefs d’État ou de gouvernement des États membres.
Les membres de l’Exécutif seraient quant à eux choisis par la personne le présidant en fonction de ses préférences politiques, une autre mesure visant à politiser l’organe exécutif de l’UE.
Par ailleurs, le droit d’initiative législative ne serait plus réservé à la Commission uniquement, puisque le Parlement obtiendrait un droit d’initiative législative à part entière.
Selon la proposition, le Parlement deviendrait également un colégislateur du budget à long terme de l’Union (le cadre financier pluriannuel ou CFP) qui, selon les eurodéputés, devrait couvrir une période de cinq ans au lieu des sept ans actuels.
Compétences de l’UE
D’autres propositions du rapport visent à élargir les compétences de l’UE dans certains domaines.
Ainsi, les eurodéputés proposent que l’environnement et la biodiversité relèvent exclusivement de la compétence de l’Union, tandis que la santé publique, la protection civile, l’industrie et l’éducation devraient selon eux être une compétence partagée entre l’UE et les États membres.
En matière d’énergie, l’UE serait chargée de négocier les accords sur le changement climatique au nom de l’Union.
Les compétences de l’UE en matière d’affaires étrangères, de sécurité et de défense extérieures ainsi que d’infrastructures transfrontalières, entre autres, seraient également considérablement élargies.
Référendums à l’échelle de l’UE
Dans le rapport, la commission AFCO demande la mise en place d’un dispositif de référendums à l’échelle de l’UE sur des questions pertinentes pour les actions et les politiques de l’Union, y compris sur la réforme des traités.
Les traités de l’UE n’ont pas été réformés depuis la ratification en 2009 du traité de Lisbonne, qui a intégré la quasi-totalité des propositions du traité constitutionnel dans les traités existants.
Cependant, une grande partie de l’engouement politique pour la réforme des traités, qui a connu son apogée lors des conférences sur l’avenir de l’Europe en 2021 et 2022, semble avoir été perdue. Cette première tentative de démocratie participative de l’UE avait rassemblé plusieurs centaines d’Européens qui avaient débattu et proposé des réformes pour l’Union.
Où en est l’idée d’une révision des traités ?
Dans son Discours annuel sur l’état de l’Union devant les parlementaires européens en septembre, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, avait déjà déclaré qu’elle soutiendrait toujours « ceux qui veulent réformer l’UE », comme c’est le cas du Parlement européen.
« Et oui, cela signifie qu’il faut passer par une convention européenne et une modification des traités, si et là où c’est nécessaire », avait-elle alors affirmé, ajoutant que « le moment est venu de créer une Convention européenne ».
Les Vingt-Sept semblent peu enclins à une modification des traités dans le contexte de la guerre en Ukraine et de la crise économique. L’année dernière, une résolution du Parlement européen appelant à une modification des traités a été ignorée par les États membres. Au lieu de cela, un questionnaire a été distribué aux capitales pour leur demander leur avis sur d’éventuelles réformes.
Les eurodéputés espèrent à présent pouvoir utiliser le rapport pour forcer un vote du Conseil — qui dans ce cas voterait à la majorité simple et non à l’unanimité — avant la fin du mandat législatif en juin 2024. Selon les eurodéputés qui ont mené les discussions concernant le rapport, cela signifierait qu’une Convention serait mise en place peu de temps après les élections européennes de juin.
Les propositions sont basées sur les recommandations formulées au terme de la Conférence sur l’avenir de l’Europe (CoFoE), un exercice de démocratie participative au cours duquel des citoyens de l’UE ont pu prendre part aux débats et à l’élaboration des politiques européennes.
« En améliorant les traités, nous pouvons garantir l’avenir de l’Europe et obtenir de meilleurs résultats pour les citoyens européens », a déclaré Gaby Bischoff, porte-parole du groupe Socialiste (S&D) au Parlement européen et co-rapporteure du dossier.
« L’UE doit être correctement équipée pour faire face au monde d’aujourd’hui et l’amélioration des traités permettra à l’UE d’être mieux positionnée pour soutenir les citoyens en temps de crise », a-t-elle ajouté.
Guy Verhofstadt, co-rapporteur du groupe libéral Renew Europe pour le dossier, a déclaré que « la guerre en Ukraine, les questions d’élargissement et les pressions géopolitiques qui nous entourent sont autant de défis à relever » et que la Convention était nécessaire pour « débattre enfin de ce que sera la réponse de l’Europe ».
Une modification des traités est « nécessaire», selon Ursula von der Leyen
Dans son Discours sur l’état de l’Union de mercredi (14 septembre), la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a apporté son soutien à une convention constitutionnelle pour réformer les traités de l’Union européenne.
[Édité par Anne-Sophie Gayet]