Le projet franco-allemand d’un budget de la zone euro a déjà du plomb dans l’aile. Plusieurs pays dont les Pays-Bas, la Belgique ou le Luxembourg ont adressé un courrier le 22 juin au président de l’Eurogroupe pour dénoncer cette idée.
Emmanuel Macron a encore du travail avant de pouvoir prétendre être le leader de la construction européenne. Alors qu‘il a négocié avec Angela Merkel le 19 juin pour la constitution d’un budget de la zone euro (l’une de ses promesses de campagne en 2017), certains pays de l’Union européenne ont d’ores et déjà montré leur scepticisme. En effet, le ministre des Finances néerlandais Wopke Hoekstra a envoyé un courrier le 22 juin au président de l’Eurozone Mario Centeno pour afficher publiquement sa désapprobation.
Une lettre qui a été signée par onze autres pays selon le média néerlandais NOS : la Belgique, le Luxembourg, l’Autriche, le Danemark, la Suède, l’Irlande, Malte, la Finlande, l’Estonie, la Lituanie et la Lettonie.
Parmi leurs objections figure le financement du projet, selon NOS qui a révélé l’information. D’après le média néerlandais, des dizaines de milliards d’euros devraient effectivement être engagées pour stimuler l’investissement dans la zone euro. Une réunion de l’Eurogroupe le 21 juin devait acter la mise en place d’une taxe sur les transactions financières pour subventionner le plan, sauf que de nombreux pays se sont opposés à cette taxe. Les Pays-Bas ont été contre un tel budget dès le début.
Pour les Néerlandais, chaque pays devrait s’assurer qu’il peut se débrouiller seul financièrement. De fait, les pays du Nord craignent des risques de dérives budgétaires. «En ce qui concerne une capacité fiscale ou un budget pour la zone euro, une question se pose : quel genre de problème cela résout-il ? Ça n’est pas clair pour nous et nous n’y sommes pas favorables», avait confié Wopke Hoekstra à l’AFP le 21 juin.
Bruno le Maire veut «convaincre»
Toujours selon l’agence de presse française, Bruno Le Maire, ministre français de l’Economie et des Finances, a tenu, de son côté, à être rassurant. Il a certes convenu que «des doutes s’étaient exprimés sur le budget de la zone euro», lors de la discussion des 27 ministres des Finances de l’UE (le Royaume Uni n’était pas présent en raison du Brexit). Toutefois, il a ajouté que «chacun connaissait les positions des Etats membres de la zone euro sur ce sujet, à nous de convaincre». Lors d’un point presse, il a également assuré que l’accord avec l’Allemagne pour la formation d’un budget de l’Eurozone était «historique» et permettrait «d’avoir une monnaie forte mais aussi une économie forte et plus d’emplois».
Une argumentation qui rappelle celle d’économistes et de personnalités politiques pour la promotion de l’euro. Avant le référendum de Maastricht, l’ancien Premier ministre Michel Rocard expliquait dans Ouest-France, le 27 août 1992: «La monnaie unique, ce sera moins de chômeurs et plus de prospérité.» En 1996, trois ans avant l’introduction de l’euro, Jacques Attali attestait également : «Lorsque [le Traité de Maastricht] sera appliqué, il est évident qu’il y aura une très forte croissance qui en découlera car nous aurons un grand espace économique avec une monnaie unique.»
Un budget de l’eurozone pour 2021 ?
L’idée est de mettre en place ce budget spécifique à la zone euro à partir de 2021, a priori dans le cadre du plan pluriannuel pour l’ensemble de l’UE. Sa création doit être approuvée par les 27 pays de l’Union à l’unanimité.
Dans la déclaration franco-allemande présentée le 19 juin, aucune mention n’avait été faite du montant du budget, renvoyant cette épineuse question à plus tard. Initialement, la France espérait plusieurs centaines de milliards d’euros, mais il ne devrait n’y en avoir que quelques dizaines.