« L’araméen est en danger », avertit l’un des derniers spécialistes syriens de la langue parlée à l’époque du Christ. Le fragile héritage linguistique de la région de Maaloula (Syrie) a été mis à mal par la guerre civile et l’exode des chrétiens.
Georges Zaarour vit à Maaloula. Il est expert en araméen, la langue parlée à l’époque du second Temple de Jérusalem (539 av. JC – 70 ap. JC), l’hébreu étant à l’époque réservé à la liturgie ou aux élites religieuses.
Il est largement admis que la langue du Christ a continué d’être parlée sans interruption jusqu’aujourd’hui, sous sa forme tardive et locale, en Syrie.
Défini par les linguistes comme « néo-araméen occidental », l’idiome est plus que jamais menacé d’extinction. « Si cela continue, la langue disparaîtra dans cinq ou dix ans », alerte Georges Zaarour.
Dans son village de Maaloula, à majorité chrétienne, les perspectives sont sombres. Aujourd’hui, « 80% des habitants de Maaloula ne parlent pas l’araméen et les 20% restants ont plus de 60 ans », déplore l’expert, lui-même âgé de soixante ans, et auteur d’une trentaine d’ouvrages sur les anciennes langues sémitiques.
La guerre civile et l’exil, depuis 2011, ont eu raison de la transmission de la langue aux jeunes générations. La ville a été occupée par deux fois par un groupe djihadiste en 2013, qui y a commis un véritable “massacre archéologique”. Plus de 6 000 habitants de Maaloula – selon l’Agence France Presse (AFP) – ont fui pendant la guerre civile, et seulement 2 000 sont revenus.
Les autres ont trouvé refuge à Damas, dans les environs, ou se sont enfuis à l’étranger. Une première conséquence directe est que « les générations de ces années de guerre sont nées en dehors de Maaloula, dans d’autres régions, où elles ont d’abord appris l’arabe », déplore Georges Zaarour.
Trois groupes linguistiques araméens sont encore parlés – mais pour combien de temps ? – à l’heure actuelle : le néo-araméen occidental de Maaloula ; le néo-araméen oriental (assyrien), langue vivante du nord de l’Irak et utilisé aujourd’hui par les communautés chrétiennes assyriennes, chaldéennes et syriennes d’Irak, d’Iran, de Syrie et du sud-est de la Turquie ; enfin, le néo-araméen central, répandu en Turquie, dans le nord-est de la Syrie et dans la diaspora.
(Sources : AFP/Terra Santa – FSSPX.Actualités – 18/06/2019)